all that time, wasted (eona)

Eclair roux accrochant le regard, la jeune femme posa un regard inquisiteur sur la plaine – cascade étincelante piquant sa curiosité au vif, comme une voie lactée lui indiquant la route à suivre.  On ne voyait que ça à l’entrée des plaines de la liberté, comme un feu ravageant le monde. Eo avait toujours été un peu jalouse de ce genre de chevelure, alors qu’elle se coltinait un brun pas très agréable à regarder, qui ne faisait rien d’autre que de ternir son visage. Elle ne savait pas pourquoi elle avait une telle passion pour les couleurs de cheveux, elle qui n’avait jamais osé franchir le pas. Mais les véritables rousses étaient tellement rares que lorsqu’elle repérait ce flamboiement au détour de son chemin, elle ne pouvait s’empêcher d’y laisser traîner son regard. Et cette fois-ci, il fallait croire qu’elle avait eu raison de se questionner, puisque lorsqu’elle repéra qui s’était – son cœur fit littéralement un bond dans sa poitrine. C’était une championne ! La championne de l’arène de Dilitirio ! Elle se souvenait encore comme si c’était hier du voyage qu’ils avaient organisé avec ses parents pour voyager, voir un peu du monde. Eo les avait tellement bassinés avec son envie d’aventures qu’ils avaient fini par céder en lui proposant ce petit compromis. Cette ville était magnifique et incroyable, mais ce qui l’était encore plus, c’était l’équipe que la jeune femme avait. D’ailleurs comment s’appelait-elle ? Eo se souvenait que leur prénom se ressemblait et que ça avait été une source très inspirante lors de ce voyage… Io… Iona ? Quelque chose dans le genre. Ses parents lui avaient dit de laisser tomber ses rêves d’arène et de toute manière, elle avait vite compris que ce n’était pas du tout le genre de vie qui lui convenait. Déjà qu’elle n’aimait pas les combats Pokémon, en faire son métier, sa vie… ? Non, très peu pour elle : voilà pourquoi elle s’était plus tournée vers l’élevage, vers une proximité avec ses petits compagnons. Elle ne jugeait pas ceux qui pratiquaient ce genre de choses, elle pouvait presque les comprendre, simplement elle n’aimait pas ça. Mais le plus important chez Iona, outre son prénom ressemblant, sa facilité déconcertante à être belle et ses cheveux de feu, c’était son équipe. Et plus particulièrement un pokémon qu’Eo affectionnait tout particulièrement et qu’elle rêvait de voir. Un énigmatique Mentali qu’elle avait dévoré du regard lorsqu’elle avait fait un passage éclair dans son arène. Elle ne pouvait pas la laisser partir de cette manière sans lui parler. Elle devait en avoir marre d’être toujours abordée de tous les côtés quand elle sortait – est-ce que c’était bien respectueux d’aller la voir de cette manière ? Elle ne savait pas. Mais elle regretterait le soir, dans son lit, de ne pas avoir essayé de lui parler. Alors elle prit son courage à deux mains et en s’éloignant légèrement de l’entrée de la ville, s’approcha de la jeune femme. « Bonjour… Je suis désolée de vous déranger, mais je voulais juste vous dire que je vous appréciais beaucoup, vous et votre équipe. » Elle ne savait pas quoi ajouter de plus, ni comment ne pas paraître trop flippante quand elle disait ça. Elle aurait aimé lui poser tout un tas de questions, non seulement sur Mentali, mais aussi sur son équipe, sa façon de vivre, comment elle envisageait la cause Pokémon… Elle essaya de ne pas la dévorer du regard, rendue trop curieuse, l’étincelle dans son regard témoignant de cette envie d’en savoir plus, sans pour autant vouloir paraître intrusive. Il lui suffirait d’un mot, d’un soupir pour qu’Eo ne s’efface et retourne vaquer à ses occupations – et passe le reste de l’après-midi à baratiner Lullaby, son Evoli, à son propos. D’ailleurs, celui-ci vint se coller contre ses mollets, ne connaissant pas vraiment la relation qu’entretenait Eo avec l’idée qu’elle se faisait d’ona.

En arrivant près d’elle, Eo remarqua qu’elle était en train de nettoyer son Mentali, son magnifique Mentali, qui semblait y prendre beaucoup de plaisir par ailleurs. La jeune femme lança un regard désabusé à son propre Evoli qu’elle ne prenait jamais le temps de peigner – principalement parce que cinq minutes plus tard on ne voyait déjà plus le résultat, mais aussi parce qu’elle n’y avait tout simplement jamais pensé. Ce dernier lui envoya un regard courroucé, essayant pour l’embêter de la faire culpabiliser de ne pas le brosser. « Bonjour et… merci. Ce sont surtout eux qui travaillent le plus dur. » L’éleveuse hocha la tête, tout à fait d’accord avec la championne d’arène. Elle était d’ailleurs contente de voir que dès la première phrase, elles semblaient sur la même longueur d’onde. Quoi qu’Eo ne comprenait pas comment une si jeune personne pouvait avoir déjà de si grandes responsabilités… Ses parents devaient déjà être champions avant elle, ils devaient l’avoir entraînés bien sûr, mais la brune ne savait pas si elle pourrait accepter ce genre de poids sur ses épaules. Mais si Iona se trouvait ici, c’était certainement parce qu’elle avait quand même quelques libertés. « Et bien sûr, vous ne nous dérangez pas ! » Cœur qui bondit dans la poitrine, petit bonheur diffus qui se répand, comme une morphine agréable. « On a déjà du te le dire, mais tu es magnifique ! » Eo crut instant qu’Iona parlait d’elle, ce qui ne lui aurait pas déplu mais qui aurait donné un sens intéressant à la rencontre, avant d’entendre la suite de la conversation. « Et tu sembles beaucoup apprécier ton amie, ça fait plaisir à voir. – Vous n’auriez pas du dire ça… commença Eo alors que Lullaby ressentait une soudaine explosion de joie. » Pépiant joyeusement, il fit trois petits bonds pour arriver à la hauteur de la jeune femme, dans l’espoir d’obtenir quelques caresses. Et peut-être même un regard du magnifique Mentali. « Je suis désolée, vous semblez me connaître, mais ce n’est pas mon cas. Quant à eux… Ce sont Astoria, Hélios et Bilbo. » L’éleveuse laissa son regard s’attarder sur les Pokémons qu’elle lui présentait, mais son regard restait accroché à Hélios, le beau Mentali, de son pelage violet. Voilà l’un des Pokémons qu’elle rêvait d’obtenir – au même titre qu’un Feunard, un Ponyta, un Sulfura… Oui, elle avait beaucoup de rêves et d’ambition, mais elle avait toute une vie pour les rencontre, pour les collectionner ou simplement pour les élever. « Enchantée, glissa Eo en ne pouvant s’empêcher de croiser le regard de l’évolution d’Evoli. » Pourtant, l’Alakazam l’intriguait grandement – un mélange détonnant de curiosité et d’angoisse, car elle savait combien il pouvait être puissant avec ses pouvoirs psychiques. « J’aime beaucoup leur surnom. Mais au risque de paraître encore indiscrète, pourquoi n’avoir que trois Pokémons alors que vous pourriez avoir une équipe complète ? N’est-ce pas plus pratique en termes de combat ? Et moi c’est Eo. Vous avez déjà fait la rencontre de Lullaby. » Elle n’avait pas sorti ses autres compagnons et elle n’était pas certaine de faire étalage de ses Pokémons soit vraiment très pertinent dans ce cadre-là. « Vous chassez des Pokémons ? demanda finalement Eo, curieuse de savoir si la rouquine comptait s’enfoncer dans les plaines. » Pour le moment elles restaient à l’entrée de Bourg Ilek mais l’éleveuse avait prévu d’aller lancer deux trois pokéballs. « Que faites-vous si loin de chez vous ? » Ce n’était bien évidemment pas du tout pour être méchante, simplement la curiosité qui lui brûlait les poumons.

« Ne sois pas jaloux Hélios, je ne fais qu’une pause ! » Lullaby se tapit sur le sol, cherchant à attirer le regard d’Hélios, sans pour autant attiser sa colère. Il voulait toujours être ami avec tout le monde, et ne voulait pas avoir le ressentiment du beau Mentali – encore moins venant de sa part d’ailleurs. Eo contempla quant à elle le couple, Iona aussi gracieuse que son Pokémon et se mit presque à être jalouse. Ils allaient si bien ensemble, ils étaient doux, précieux, un peu inatteignable aussi, comme s’ils faisaient partie d’un autre monde. Voilà à quoi elle pensait quand elle plantait son regard dans celui de la championne d’arène : comme si elle était ailleurs. Pourtant, l’éleveuse était contente de voir que son propre Pokémon n’était pas aussi jaloux que ceux des autres. Elle ne pouvait que penser à l’Héricendre de Molly, ou encore l’Hélios d’Iona… Eo gérait très mal la jalousie, et elle n’aurait jamais su comment canaliser toute cette énergie venant de son Pokémon. Heureusement, l’Evoli n’était pas du tout de ce genre-là, même s’il était extrêmement attaché à sa dresseuse. « Je suppose que j’ai préféré me concentrer sur ceux que j’avais déjà. Et puis je suis devenue chamionne d’arène, ce qui signifie se concentrer sur un type. Et dans les combats d’arène, il est rare de faire combattre plus de trois ou quatre Pokémon. » Haha, oui, elle devait être tellement puissante qu’elle devait aligner les Pokémons adverses d’en face. « D’accord. Ca m’avait toujours posé souci. Mais je trouve que c’est une bonne façon de voir les choses. » C’est vrai qu’elle s’était jetée sur tous les Pokémons de la plaine, sans forcément mûrir chacun de ses captures… Mais elle avait bien pris soin de tisser des relations avec chacun d’entre eux par la suite. De toute manière, elle passait toute sa journée en leur compagnie, elle voyait mal comment ne pas tisser des liens après ça.

« Enchantée, Eo. Lullaby. Ce sont là aussi de jolis noms. » Elle hocha la tête, sans pour autant y croire vraiment – quoi, elle n’allait pas lui répondre qu’ils étaient hideux. « J’explore, simplement. Evidemment, l’idée de me faire de nouveaux amis Pokémons ne me rebute pas, au contraire, mais ce n’était pas forcément le but premier de mon voyage. – Et alors, tu as pu voir de jolis coins ? » Eo était toujours à la recherche d’un point de vue magnifique pour pouvoir croquer un peu,  alors si elle avait quelques informations à lui donner à ce propos, elle était preneuse. « En ce moment, c’est plutôt calme à l’arène. J’avais des envies de voyage. De découvrir d’autres choses que mon petit village natal. – Oui, c’est compréhensible… Enfin, vous ne me verrez jamais dans votre arène, ce n’est pas vraiment mon genre d’occupation. J’ai un peu de mal à l’idée de faire combattre mes Pokémons surtout dans une arène… Mais c’est personnel bien sûr. » Elle réfléchit un instant, se demandant si le combat en arène pourrait la séduire… Non, vraiment pas. Elle aimait l’idée de voir la combattivité de Lullaby, mais seulement face à des Pokémons en qui il avait confiance et avec qui il pouvait dire stop si jamais ça allait trop loin. « Et vous alors ? Tiens d’ailleurs, je ne pense pas que l’on soit si éloignées dans l’âge, peut-être pourrions-nous nous tutoyer, non ? Quelle est votre motivation dans la vie, que faites-vous par ici ? – Oui, bien sûr, tu peux me tutoyer. J’avais envie de voir du monde. De découvrir quelques lieux inédits. Et j’aime beaucoup les Pokémons, je voulais en rencontrer, devenir amie avec eux. Je suis une éleveuse, j’aime beaucoup prendre soin des œufs. Je ne sais pas trop pour tout dire pourquoi je suis là… Enfin, si, j’aimerais beaucoup emmener mon Evoli à un aussi haut niveau que votre Mentali. »

« Dis, ça ne te dirait pas du thé ? Je vais m’en faire. » Eo haussa un sourcil, un peu étonnée par la proposition, mais pas forcément contre. Elle adorait le thé, et elle ne rencontrait pas assez de personnes qui aimaient ça pour que ce soit courant comme situation. « Si si. J’aime le thé. » Wah, on dirait ce genre de discussions qu’on pourrait avoir dans un rêve, du genre qui n’avaient ni queue ni tête. Mais soit. « Tu souhaites que l’on retourne en ville du coup ? la questionna-t-elle tout de même, ne sachant pas vraiment ce que la rouquine attendait d’elle. « Et toi, je suppose que tu es accompagnée d’autres Pokémons que Lullaby ? – Oui, effectivement, mais j’évite de tous les sortir en même temps. D’une part parce qu’ils seraient capable de se perdre au milieu des plaines, et aussi pour passer des moments privilégiés avec chacun d’entre eux. Et aussi parce que sinon ils ne font que discuter entre eux et je me sens écartée de la conversation ! » Elle éclata de rire, un peu pour indiquer qu’il s’agissait d’une blague, mais pas trop en même temps – elle craignait que ses Pokémons soient capables d’un tel acte de barbarie envers elle, donc elle ne préférait pas tenter.

«  Je ne vais pas céder à la tentation de dire que Dilitirio est déjà magnifique. Cela fait un peu trop agence de voyage. – Ah, ah, non, je connais certaines personnes qui n’aiment pas leur ville d’origine. J’ai déjà visité Dilitirio mais il est vrai que je ne me suis pas assez arrêtée pour contempler toutes les jolies choses qu’elle avait à m’offrir… » A cette époque-là elle n’avait pas encore osé poser ses doigts sur une feuille blanche, préférant tout créer dans sa tête pour le moment. La jeune femme enchaîna sur les paysages qu’elle avait eu la chance de contempler au sein des plaines. « J’ai toujours aimé me rendre sur le littoral. Le bruit est vagues est très apaisant, c’est parfait pour méditer. – Je dois avouer que je n’ai jamais eu l’occasion de vraiment vivre du côté du littoral. Il faudrait que je m’y rende, mais je crois que l’océan n’est pas trop fait pour moi. – As-tu des suggestions d’endroits où aller ? – Il y a certains panoramas très jolis dans les plaines, mais je dois avouer avoir une petite préférence pour les Falaises du Bout du Monde. Sinon Anémos revêt un grand intérêt pour moi. Mais tu es certainement déjà passée par celle-ci pour arriver jusqu’ici, non ? »

La discussion glissa sur les combats de Pokémon. La championne d’arène accepta apparemment son point de vue, ce qui plut à l’éleveuse. « J’avoue que le combat d’arène amène une certaine compétition et obligation que les combats amicaux n’ont pas. Mais je dirais que puisqu’ils sont réglementés, ils sont plus faciles à encadrer et à stopper en cas de débordement. – Oui, même si je ne fais que des combats amicaux justement pour éviter ce genre de débordements. Après je ne juge pas les champions d’arène. Certains Pokémons aiment se battre j’imagine. Je ne suis pas assez renseignée sur la question pour avoir un avis constructif malheureusement. » Rebondissant sur son métier, Iona trouvait aussi qu’il s’agissait d’un beau métier. Décidemment. Que d’accords entre elles ! « Tu aurais des conseils particuliers à me donner pour prendre soin d’un œuf ? – Oui, le garder au chaud, longtemps. Lui parler un peu, de temps en temps, je ne suis pas sûre que ça aide mais je suis persuadée qu’ils peuvent commencer à entendre certaines choses. Et beaucoup marcher avec – ça les berce, ils aiment ça. » C’était les premiers conseils qui lui venaient en tête, peut-être en aurait-elle d’autres par la suite… Hélios se pavana un instant en entendant ses propos – exactement comme Lullaby dis-donc ! « Vu comme Lullaby a l’air heureux avec toi, je pense que tu y arriveras ! – Merci, ça me touche beaucoup, venant d’une championne. »

« — Ce n'est pas nécessaire. » Rendue curieuse par le regard énigmatique de la jeune femme, Eo ne put s’empêcher de sourire en la voyant sortir tout le matériel nécessaire pour le thé de son sac à dos. L’éleveuse ne s’était pas du tout attendue à ça quand elle avait évoqué une petite tasse de thé, mais pourquoi pas – elle avait de toute manière envie de rester dans la nature donc ce n’était pas elle que ça dérangerait. Iona semblait avoir amassé des bouts de bois avant leur rencontre, et commença à créer de quoi faire un feu. Eo savait en faire un, bien sûr, mais elle évitait un maximum de le faire, car elle se savait trop maladroite pour le bien-être de la forêt. Elle se savait malheureusement capable de mettre le feu à la forêt sans le vouloir, donc elle préférait pour le moment ne pas trop rester dehors. Viendrait un jour l’hiver, et à ce moment-là elle ne pourrait plus vraiment reculer devant cette éventualité. Quoi que déclarer un feu de forêt par -5 était beaucoup plus compliqué – voire impossible – qu’en plein été lorsque l’herbe craquait sous nos pas tellement elle était desséchée. La brune lui proposa un coup de main mais Iona semblait bien rôdée et elle n’avait pas besoin de son aide. « Concernant les miens, tout dépend de leurs envies. Mais ils sont souvent tous ensemble dehors. Sauf quand Bilbo n’a pas envie de marcher ou que j’ai trop peur qu’Hélios se perde… – Ah, il a aussi cette fâcheuse tendance ?! Peut-être que c’est un trait commun aux Evolis alors… » Elle aussi avait constamment peur de perdre Lullaby, qui avait tendance à regarder le ciel et les oisillons que le chemin. Mais Hélios était un Mentali ! Déjà qu’avec son Evoli Shiny elle n’en menait pas large, elle ne pouvait même pas imaginer si c’était l’une de ses évolutions… La rouquine lui demanda ensuite si elle appréciait sa ville natale, et laquelle c’était. « Je viens de Néros ! Et non, je ne suis pas dans ce cas-là, j’aime beaucoup ma ville natale. Même si je ne souhaiterais pas y vivre toute ma vie j’ai besoin d’y retourner régulièrement ne serait-ce que pour me ressourcer et voir ma famille. »

L’éleveuse s’assit à côté du feu qui commençait lentement à ne devenir que des braises – il ne fallait pas un immense brasier pour faire chauffer du thé. Eo ne s’y connaissait pas vraiment en combats de Pokémon alors avoir l’avis de la championne d’arène était une bonne manière, en tout cas pour elle, d’envisager d’autres manières de penser et de voir les choses. Elle lui expliqua que ses Pokémons aimaient effectivement se battre mais que ce n’était pas non plus une généralité ce qui confortait Eo dans son idée. « C'est un peu comme les humains, je dirais. Certains apprécient les combats, d'autres non. Pour ma part, c'est le cas, en tous cas, pour l'instant. Peut-être que dans cinq ans, que dans dix ans, je n'aimerais plus cela et que j’arrêterais tout, qui sait ? – Oui, j’ai rencontré un ancien champion d’arène dans les plaines qui a laissé ses Pokémons aimant se battre à l’arène pour parcourir le monde. Je trouve ça très courageux. Enfin, pour le moment ils t’accompagnent. Je n’aimerais pas avoir à me séparer de mes Pokémons… Heureusement nous semblons sur la même longueur d’onde pour le moment. » Discuter avec la jeune femme était très reposant, bien loin du stress et de l’adrénaline de certaines de ses chasses Pokémons.


Lorsque le sujet glissa sur les œufs Pokémon, Eo ne put s’empêcher d’être heureuse de pouvoir être utile à une championne d’arène ! Jamais elle n’aurait cru ça possible mais bon, parfois on ne pouvait pas prédire les choses. « — Je vois. Pour la chaleur, j'avais déjà la bonne intuition. Par contre, je n'avais jamais songé à lui parler... – Après je dois avouer que tous les œufs sont un peu différents, donc… Comme tu le disais, c’est un peu comme avec les humains, il n’y a pas vraiment de recette miracle… — J'ai beau être championne, j'ai encore beaucoup de choses à apprendre, la preuve. – Oui mais tu en sais déjà énormément ! Ca doit être incroyable. A quoi est ton thé au fait ? »

« — Peut-être que c'est commun aux Evoli, en effet. En tous cas, ça ne s'améliore pas avec l'évolution ! » Eo fit une grimace. Déjà qu’elle hésitait grandement à faire évoluer Lullaby, si en plus il devenait de plus en plus indépendant… Peut-être qu’elle ne cèderait pas à la tentation finalement. En fait, elle hésitait surtout parce qu’il s’agissait d’un Pokémon chromatique : elle aimait ce pelage argenté si peu commun. Elle n’était pas certaine de vouloir un Noctali, même s’il gardait cette particularité. « — Je vois ce que tu veux dire. Il est vrai que j'ai eu du mal à quitter Dilitirio, mais en même temps, je suis plutôt contente de voir un peu autre chose. » La jeune femme hocha lentement la tête, d’accord avec la championne d’arène. Elle devait avoir d’autant plus de raisons de regarder en arrière… « — Tu as des frères et sœurs ? – J’ai deux frères. Mon plus grand-frère est parti dans la Brigade anti-team rocket alors je ne le vois que très rarement… Et mon frère jumeau… Je ne sais pas, on s’est un peu éloignés depuis que l’on a reçu nos Pokémons respectifs. Et toi ? » Elle haussa les épaules. Autant elle avait beaucoup de fierté à expliquer que son frère essayait de sauver le monde, autant pour ce qui était de Ciel… Elle essayait de ne pas trop y penser de peur d’être attristée un long moment. Un frère jumeau, ce n’était pas comme un frère normal, et être séparée de lui de cette manière… Elle avait trouvé en Lullaby une sorte de réceptacle affectif qui l’empêchait de s’effondrer, mais voilà… Heureusement ils restaient en contact via leur Pokémontre respective. « — Cet ancien champion ne s'appelait pas Kyle par hasard ? La personne que tu me décris correspondrait bien à mon prédécesseur. – Oh ! Oui. Il s’appelait comme ça. Je ne savais pas qu’il était le champion de Dilitirio. Nous n’avons pas non plus eu beaucoup le temps de discuter… » Elle le regrettait un peu d’ailleurs, elle était persuadée qu’ils se seraient bien entendus. Enfin, elle avait l’air de les collectionner. « Mais vous n’êtes pas de la même famille on est d’accord ? » Ou alors c'était son copain ?

Lorsqu’Iona évoqua la possibilité de laisser ses Pokémons derrière elles, ils ne purent s’empêcher de se coller à elle pour lui montrer qu’ils ne voulaient pas qu’elle les abandonne. Eo sourit chaleureusement en voyant le comportement de ses compagnons. « — J'imagine qu'ils doivent être différents, en effet, mais c'est un peu plus compliqué à comprendre que les Pokémon, je dois dire ! – Ils ne peuvent pas communiquer ce qui est un peu compliqué. Mais ça me plait de les voir éclore, grandir… Tout comme les combats t’intéresse j’imagine. » Iona sortit deux petites boîtes à thé et Eo se fit une petite nota mentale : elle voulait le même genre d’attirail pour ses escapades. « — Alors là j'ai un thé vert à la fleur de cerisier et un thé noir agrumes. C'est aussi ça qui me manque de chez moi, ma collection de thé ! – Un thé noir agrumes s’il te plait. Je suis une grande fane de thé mais je ne savais pas que ce genre de petites choses se faisait… Je vais sérieusement réfléchir à faire cet investissement. »

« — Moi aussi, j'ai deux frères. Ils sont plus âgés que moi. L'un d'eux élève des Togépi à Dilitirio et l'autre est parti il y a quelques années maintenant à la recherche de nouveaux Pokémon à collectionner et je n'ai quasiment jamais de nouvelles. – Je crois que nous recherchons le même frère alors, marmonna Eo, déçue de voir que beaucoup avaient ce même comportement qu’elle avait abhorrait depuis de longues années maintenant. Mais le deuxième doit bien s’amuser à élever des Togépis. Tu n’as jamais eu l’envie de lui en demander un pou ton équipe ? » Eo aimait tout particulièrement ce Pokémon qu’elle trouvait fascinant de par sa capacité à être mignon. « — Oh, non. Il a juste entendu parlé de moi et m'a proposé de lui succéder. Je suppose qu'il avait déjà en tête de partir, mais qu'il ne pouvait pas non plus tout plaquer comme ça. – Ca a dû être un grand honneur. Ca n’a pas été trop difficile ? Du coup tes parents ne sont pas du tout impliqués dans le processus, c’est ça ? » L’éleveuse avait l’habitude de voir les champions se succéder, en léguant les Pokémons par la même occasion. C’était la première fois qu’elle découvrait une championne d’arène créée de toute pièce.

Le thé infusa lentement et elle pouvait déjà sentir les arômes s’élever du réchaud – elle reçut une tasse de thé et elle respira les effluves un long moment avant d’y tremper ses lèvres. Elle avait pris l’habitude de boire du thé avec sa grand-mère, décédée quelques années plus tôt. Pour elle, c’était une passion, une révélation – Eo avait tout appris de cette fascinante femme qui adorait le thé mais qui ne finissait jamais ses tasses. Sa maison était parsemée de celles-ci à moitié vide, de toutes les tailles, de toutes les couleurs, embaumant le lieu des derniers parfums de feuilles détrempées. « Je viens d'y penser, mais j'espère que tu ne prends pas de sucre... – Je suis déçue de voir qu’il n’y a ni sucre ni lait, ne put-elle s’empêcher d’ironiser. » La dresseuse farfouilla dans son sac, déterrant entre un carnet de dessin, des crayons, des vêtements de rechange, des bonbons, des Pokéballs et tout un autre fourbi incroyable, une plaque de chocolat qui n’était pas encore entamée. Elle l’ouvrit et la tendit à Iona. « Je ne mets pas de sucre mais je mange toujours un petit carré de chocolat avec. Tu en voudrais ? » Elle se laissa finalement tenter et but une gorgée du breuvage chaud, qui traça un sillon le long de sa gorge. Délicieux. « – C’est peut-être encombrant tout ce matériel mais je ne pourrais pas m’en passer ! - Où est-ce que tu achètes ton thé ? Il est vraiment très bon. En tout cas je pense qu’il me manque quelque chose de ce genre pour devenir une parfaite dresseur. » Elle ne put s’empêcher de rire en imaginant ce que quelqu’un penserait en arrivant là, à l’orée d’une ville, deux jeunes femmes prenant un thé comme si le temps était suspendu. « On se croirait presque dans Alice aux Pays des Merveilles. » Lullaby s’approcha de la tasse, reniflant la mixture, rendu curieux par toutes ces odeurs contradictoires. « Tu goûteras à la fin Lulla. »