Fuseaux s’élançant jusqu’aux cieux étoilés, les gratte-ciel de Bourg-Ilek méritaient bien leur nom. Elle avait l’impression de contempler de longues échelles grimpant jusqu’au porte des étoiles, titillant la lune, chavirant le cœur des planètes. Loin étaient les arbres majestueux d’Anémos, les criques discrètes de Néros, le littoral léchant la côte patiemment. Voilà qu’Eo se trouvait dans une ville gigantesque, loupiote scintillant dans l’étendue de la nuit, pulsant au rythme des entreprises, des boutiques, des marchés nocturnes et matinaux, du brouhaha incessant des fourmis travaillant au bon fonctionnement de leur fourmilière. La jeune femme n’était pas certaine d’aimer ce capharnaüm étincelant, comme un cœur électrique qui battrait la chamade sans pouvoir s’arrêter. L’impression d’infini qui se dégageait de la ville ne l’avait pas rassurée, pas plus que les grandes routes, qui virevoltaient entre les bâtiments, plus longues encore que tout le chemin qu’elle avait parcouru pour venir ici. C’était la première fois qu’elle voyait Bourg-Ilek, et elle n’était pas certaine de vouloir y retourner un jour – quoi qu’elle apprendrait peut-être à aimer ce lieu de vie, de vivier d’animations qui lui offrirait culture, apprentissage et nouveauté. Elle n’avait pas envie de juger cette ville par sa première impression, capharnaüm d’odeurs, de sons et de couleurs, qui l’empêchaient de vraiment apprécier la beauté du paysage, de l’architecture, de l’agencement atypique du lieu. Eo avait pris soin de bien déposer Lullaby et Buckbrush dans leur petite pokéball : elle avait peur qu’ils ne s’échappent, s’enfuient au détour d’un restaurant pour ne jamais réapparaître. Pourtant, elle avait envie de leur montrer ces éclats, ces bribes scintillantes qui faisaient de l’ombre aux étoiles, aux Bourg-Ilekois se pavanant comme des paons faisant la roue, précieux, heureux de montrer l’incroyable férocité et technologie de leur ville. En ce moment se tenait tout un panel de conférence, allant de la physique pure aux questionnements éthiques. On parlerait d’Arceus, de généalogie, de baies Pêcha et d’Hyperball, de Pokérécré et de Pokémontre. Il y aurait énormément de choses à acheter, comme d’habitude, parce que Bourg-Ilek était aussi la ville des achats, spontanés ou non, d’ailleurs. Et Eo se savait sensible à ce genre de marketing idiot, qui comptait sur les sentiments instinctifs, sur le besoin compulsif d’acheter. Elle avait bien caché sa bourse, de peur de piocher dedans sans le vouloir – même si ça semblait un peu idiot à dire.
Après quelques tournoiements désabusés, un chemin perdu et deux passants heurtés, elle arriva finalement face à une sorte de palace, qu’elle ne connaissait pas et dont elle n’était même pas capable de trouver le nom. Elle préféra ne pas s’attarder plus, serrant son sac en bandoulière contre son flanc, stressée par tout ce monde, par cette foule qui virevoltait autour d’elle comme un millier de papillons lâchés dans une arène. Elle attrapa un badge qui signalait qu’elle avait bien payé l’entrée, chercha la salle de conférence qui l’intéressait, se glissa au dernier rang, et assise sur sa chaise, trépigna d’impatience à l’idée d’apprendre de nouvelles choses. Le comportement du Pokémon : inné ou appris ? Bien entendu il s’agissait d’une conférence de vulgarisation, jamais la jeune soigneuse n’aurait pu comprendre la complexité des réseaux, de la biologie infinitésimale, de tout ce qui se passait vraiment dans les gènes, dans le cerveau d’un Pokémon. Et elle n’était pas certaine de vouloir le savoir.
La conférence prit fin dans un tonnerre d’applaudissement. La jeune femme avait encore des milliers de question à poser à ces scientifiques remarquables mais elle avait peur d’embêter. De faire perdre du temps. Elle remarqua que bon nombre de dresseurs avaient sorti leur pokémon et que certains scientifiques passaient entre les rangs pour les contempler – et elle pouvait les comprendre, il y avait un Goupix chromatique ! Elle sauta presque d’excitation en regardant cette foule de pokémons différents, ces âmes inextricables qui partageaient leur vie… Elle sortit Lullaby : peut-être qu’un scientifique viendrait la voir et alors, elle pourrait discrètement poser des questions sur le comportement étrange qu’il pouvait avoir. « Tu restes à côté de moi, d’accord ? Si tu t’éloignes d’un mètre seulement, je te laisse enfermé dans ta pokéball pendant une semaine, c’est compris ? » Elle prit un air sérieux et sévère : elle voulait que le message passe correctement. Lullaby sembla comprendre, ses grandes oreilles s’aplatissant sur son crâne. Il n’avait pas l’air de comprendre pourquoi je lui interdisais d’aller faire copain-copain avec tout le monde mais à mesure que les jours passaient, la jeune femme prenait peur à chaque fois qu’il disparaissait de son champ de vision. Elle avisa une scientifique un peu plus loin, qui semblait rester en retrait alors que tout le monde pullulait autour du Goupix fantastique.
Peut-être était-ce la saison qui voulût ça, mais Richard foisonnait d'idées et d’événements de tout genre. Il organisait sans cesse réceptions et conférences sur des thèmes variés, et permettait ainsi à ses scientifiques et collègues de prouver leurs capacités. Le seul petit bémol était que Mina n'était pas à l'aise en public, et qu'elle n'avait jamais été doué pour expliquer ses idées de façon ordinaire. Tout néophyte écoutant ses paroles devait être rapidement perdu dans le brouhaha constant de ses mots et de ses termes trop scientifiques. Mina était obscure, dans ses explications, et elle n'y pouvait rien. C'est pour cela qu'elle s'attela à rester en marge des intervenants - Richard fit une brillante prestation à propos de biologie pokémon, et un collègue qu'elle connaissait peu et qui travaillait du côté de la science comportementale fit fureur auprès du public. Finalement, dans une joyeuse explosion de bruits, le public se mêla aux scientifiques. Elle crut voir un pokémon chromatique - un goupix, d'après les exclamations endiablées des badauds. Richard était déjà là, en première ligne. Peut-être chercha t-il Mina des yeux, mais elle s'était encore éloignée de cette joyeuse foule aux mouvements trop indéterminés pour elle. La seule idée de se plonger dans ce brouhaha ambiant lui donnait des sueurs froides.
Mina songea que Athéna n'avait aucune raison de faire grise mine dans sa pokéball, et l'évoli femelle jaillit de sa prison bicolore en ébrouant son pelage. Mina lui fit un sourire et se pencha vers elle. « Ma chérie, ne t'éloigne pas, ou tu risques de te faire écraser. » Alors que Mina levait la tête, Athéna et elle-même remarquèrent en même temps la jeune femme et son évoli chromatique. Le coeur de la scientifique se serra d'émotions, alors que Athéna bondissait vers lui, dans une joie spontanée et sincère. Mina se dépêcha de la rattraper, mais elle avait déjà bondit, à quelques pas de l'évoli inconnu au pelage si incroyable. Mina s'efforça de ne pas dévisager l'évoli pâle, et hocha la tête devant la dresseuse, avec un air penaud. « Veuillez excuser mon évoli, elle n'a pas l'habitude de voir de congénères, alors elle laisse échapper sa joie exubérante. Athéna » ordonna Mina, et l'évoli, avec un petit reniflement triste, vint docilement s'asseoir aux pieds de Mina, sans cesser d'observer son confrère. Ses petits yeux brillaient de curiosité. « Je suppose que vous venez d'assister à la conférence. Quelle partie vous intéressait en particulier ? A moins que ce ne soit juste une curiosité globale ? » Seule à seule, Mina se sentait plus à l'aise ; elle passa sa main sur sa blouse, comme pour en retirer un froissement imaginaire ; la chemise en dessous collait à sa peau à cause de la chaleur de la salle. Athéna émit un petit gémissement - de toute évidence, l'évoli avait très envie de faire connaissance avec son sosie chromatique. Mina ne put réprimer un sourire affectueux, et son regard engloba le pokémon à la robe si particulière. C'était incroyable - un évoli shiny. La somme de ses espoirs réunis en une créature, là, devant ses yeux.
Eo n’aurait pas pu contenir son Evoli même si elle l’avait enchaîné. Lullaby avait cette tentation désagréable de toujours se coller aux autres pokémons, quitte parfois à se prendre des coups de patte bien sentis lorsqu’il outrepassait ses droits. Mais lorsqu’il remarqua cette divine créature se jeter sur lui spontanément, son cœur se gonfla d’orgueil et il bomba le torse, s’ébrouant pour faire paraître son pelage beaucoup plus épais. Il posa son regard malicieux sur elle, essayant de retenir sa joie de voir enfin un pokémon penser comme lui, mais aussi ravi de rencontrer une charmante demoiselle de son espèce. Il en avait un peu marre de se coltiner Buckbrush a toutes les sauces, alors quand se pointa cette délicate créature… La jeune femme leva les yeux en ciel en comprenant que même ces petites bestioles pouvaient avoir envie de plaire, et préféra se concentrer sur la personne qui détenait cette Evoli curieuse. « Veuillez excuser mon Evoli, elle n’a pas l’habitude de voir de congénères, alors elle laisse échapper sa joie exubérante. Athéna. » Eo contempla un instant la scientifique, cherchant son nom sur son badge : Bloom. Voilà qu’elle se retrouvait face à un puits de science qui détenait un Evoli – presque – plus mignon que Lullaby (elle ne le lui avouerait jamais au pire de recevoir des représailles) et qui pourrait peut-être répondre à ses questions, puisqu’elle possédait un pokémon au caractère nébuleux elle-aussi. « Oh, non, rassurez-vous ! Heureusement qu’elle est venue la première d’ailleurs, sinon Lullaby se serait jeté sur elle. C’est un très joli surnom qu’elle a. » Eo évitait de toucher les pokémons des autres sans leur aval alors elle se contenta de la caresser du regard, tandis que le sien se pavanait comme un paon faisant la roue devant la déesse de la sagesse. « Je suppose que vous venez d’assister à la conférence. Quelle partie vous intéressait en particulier ? A moins que ce ne soit juste une curiosité globale ? – Oui, c’était d’ailleurs très intéressant, je vous remercie d’organiser ce genre de colloques pour les personnes un peu moins au courant. Votre travail est fascinant ! Une curiosité globale m’a amenée ici, il est vrai, mais j’avais aussi quelques questionnements, et je pensais trouver des réponses. » Elle ne savait pas trop comment présenter la chose, ni même si la scientifique avait un peu de temps à lui accorder : ils devaient avoir un emploi du temps si chargé ! Les découvertes n’attendaient pas et le monde continuait de tourner pendant qu’ils passaient des heures enfermées dans un laboratoire. L’éleveuse n’était pas certaine de pouvoir supporter un tel fardeau : l’angoisse du temps qui ne cessait de nous filer entre les doigts, à l’instar des découvertes que l’on effleurait sans jamais pouvoir les exploiter, sans jamais vraiment savoir si notre instinct était juste ou pas. Guidés par des pulsions, dans des ténèbres chaotiques, voilà comment elle percevait tous ces scientifiques qui, pas après pas, à tâtons, levaient le voile de l’incertitude sur la biologie, la chimie, la physique mais aussi le comportement des pokémons. On savait si peu de choses à leur sujet alors qu’ils faisaient partie du quotidien de tous… « Si vous n’avez pas le temps je comprendrais tout à fait, mais… En fait, je venais pour essayer de décrypter le comportement de Lullaby. Il n’a pas l’air de se soucier du danger, il gambade partout dans les plaines, va à la rencontre de nombreux pokémons, sauf qu’on ne sait jamais sur quoi on peut tomber. Il refuse aussi très souvent de m’obéir… » Il ne les écoutait même plus discuter, enfermé dans son cocon de curiosité, prêt à sauter sur Athéna pour rouler au sol dès qu’elle lui en donnerait l’autorisation. Ou alors il risquait de braver l’interdit de sa dresseuse et de la bousculer tout de suite. « Donc j’étais curieuse d’en apprendre un peu sur leur génétique, mais aussi les causes de leur comportement, et de leurs habitudes. Je voulais savoir s’il y avait un moyen d’arrêter de le perdre constamment. En plus d’être un pokémon plutôt prisé, il a ce pelage qui le rend particulièrement attractif pour la Team Rocket par exemple. Un peu de discipline ne serait pas refus… soupira-t-elle. » Elle se rendit soudainement compte qu’elle avait peut-être un peu trop parlé, et essaya de rediriger la conversation vers son interlocutrice – elle n’aimait pas être le centre d’attention des gens habituellement. « Et vous ? Vous ne vous ennuyez pas trop à devoir vulgariser vos travaux pour le grand public ? »
D'après ce que voyait Mina, Richard était entouré de jeunes groupies, qui toutes voulaient lui montrer leurs pokémons. Quant à ses autres collègues, ils erraient à fureter auprès des raretés amenées par des dresseurs. Hormis le goupix au pelage chromatique, elle remarqua un carapuce étrange aux dimensions plus grandes que la moyenne, et un sabelette aux écailles portant comme des tatouages naturels. Mais ce qui avivait réellement la curiosité de Mina, c'était l'évoli pâle. Elle s'était approchée, gênée que Athéna ne se montre aussi impolie. Mais l'inconnue ne semblait pas embarrassée, tout comme son pokémon shiny. Mina la remercia de sa délicatesse d'un sourire doux. « Je ne peux qu'en dire de même de votre magnifique pokémon. Lullaby. Très bon choix. » Athéna semblait totalement sous le charme, et elle acquiesça, comme si elle soutenait totalement ce choix elle aussi. L'évoli femelle n'avait d'yeux que pour son pendant mâle, subjuguée par sa fourrure pâle et par ses grands airs.
La curiosité de la jeune femme était de bon aloi. Elle hocha la tête à ses paroles, et l'encouragea à poursuivre : « Je vois. Mon collègue Richard Collins est celui qui a créé ce genre d'événements, mais je suis toujours ravie de rencontrer de jeunes gens passionnés et curieux. Si je le puis, je me ferai un plaisir de répondre à vos interrogations, quelles qu'elles soient. » Mina suivit le regard de l'inconnue sur son pokémon. De toute évidence, c'était à propos de lui qu'elle possédait doutes et questionnements, et la scientifique avait hâte de savoir afin de pouvoir les aider. C'est donc avec beaucoup d'attention qu'elle écouta la suite. Son regard passa de la dresseuse à son pokémon, comme pour jauger d'elle-même, bien que tout ce qu'elle puisse voir était la fierté du pokémon, comme si il tentait une quelconque parade amoureuse. Athéna finit par se rouler en boule en présentant son flanc, dans une invitation à venir contre elle et à faire connaissance. Sortant de son observation, Mina redressa les yeux, surprise par le questionnement direct. Habituellement, les gens ne s'intéressaient qu'à leurs propres problèmes, attendaient une réponse puis partaient satisfaits.
« Je trouve toujours beaucoup de plaisir à partager mon savoir, aussi infime soit-il. Vulgariser, cela signifie mettre à portée de tous. Je trouve cette idée à la fois sublime et déroutante, de pouvoir exprimer en peu de choses autant de savoir. » Mais elle perdait le fil, et se concentra sur ce qu'était venu faire la demoiselle. « Je réalise que je ne me suis pas présentée. Je m'appelle Mina Bloom, et je suis spécialisée dans la recherche sur l'ADN pokémon, notamment sur la façon dont il influe l'évolution, et sur comment influencent les aides externes dans l'évolution. » Elle se pencha, courbée, vers Lullaby et tendit sa main, attendant de voir si sa curiosité pour l'évoli femelle serait rejeté au second plan en voyant une personne inconnue l'inviter à la renifler. « Votre spécimen d'évoli m'a l'air encore jeune. Tous les pokémons ne réagissent pas de la même façon, mais tout comme chez les humains, il y a chez les jeunes cet enthousiasme, cette vie qui flamboie. Peut-être est-ce dû également à son caractère qui se forge, ou peut-être cherche t-il des références externes afin d'y calquer son attitude ? » Elle formulait tout haut des idées sans queue ni tête. « Prenons en référence Athéna. C'est une compagne douce, au caractère très câlin, mais également très dynamique. Elle ne cesse de courir partout, mais elle sait se montrer docile. » Elle comprenait parfaitement qu'un évoli, pokémon rare, soit de surcroît une cible de voleurs, avec son pelage blanc. Mina sourit à Lullaby et se mit à lui parler, comme à un être égal.
« Il me semble bien voir chez toi quelque chose de mutin. Ainsi, tu braves le danger sans même t'y attarder ? Cela met ta dresseuse dans une situation embarrassante, le sais-tu ? Ce n'est pas une façon de se comporter avec ses proches que de leur causer du souci. Imagine si tu tombais sur quelqu'un de mal intentionné ? » Athéna s'était tournée vers nous aussi, et s'assit avant de pousser un petit miaulement, comme pour protester contre l'idée saugrenue que quelqu'un vole son nouvel ami. « J'aimerai avoir une réponse claire à vos questions, mais hélas, je ne suis pas comportementaliste. » Mina se sentait un peu gênée de ne pas pouvoir l'aider plus que ça. « Mais peut-être puis-je glisser quelques mots à un ami qui pourrait vous aider à le discipliner en douceur. »
Lullaby approcha sa truffe de la belle Athéna – il avait l’impression de trouver en elle une étincelle sauvage, comme une âme indomptable. Il ne pouvait pas dire pourquoi, c’était dans le regard, dans la façon qu’elle avait de se mouvoir, faisant onduler son pelage brun comme une prairie soulevée par le vent. L’Evoli ne s’était jamais vraiment vu – au détour d’un miroir ou d’une vitrine bien sûr, mais il voyait toujours les autres constamment, alors il en oubliait complètement sa couleur différente. Sauf qu’Athéna n’était venue le voir que pour son pelage atypique. Autant il la trouvait mignonne et il lui donna un coup de tête pour lui montrer sa soudaine affection, autant il restait un peu sur ses gardes, curieux de savoir si elle voulait quelque chose de lui. « Je ne peux qu'en dire de même de votre magnifique pokémon. Lullaby. Très bon choix. » Et le plus amusant de tout, c’était qu’elle ne l’avait pas choisi, comme bon nombre de jeunes dresseurs. Un cadeau, un beau cadeau, le plus magnifique des cadeaux. « Je vois. Mon collègue Richard Collins est celui qui a créé ce genre d'événements, mais je suis toujours ravie de rencontrer de jeunes gens passionnés et curieux. Si je le puis, je me ferai un plaisir de répondre à vos interrogations, quelles qu'elles soient. » La jeune femme échappa presque un ronronnement, heureuse de savoir qu’elle avait, l’espace de quelques minutes, une oreille professionnelle attentive et qui pourrait peut-être l’aider, la mettre sur le droit chemin. Athéna se roula en boule, montrant son flanc, indiquant à Lullaby qu’elle souhaitait apprendre le connaître. Lullaby fourragea dans sa fourrure du bout de son museau, avant de se fondre près d’elle, avant de pépier deux trois choses qu’Eo ne prit même pas le temps d’écouter – un peu d’intimité ne pouvait pas faire de mal.
« Je trouve toujours beaucoup de plaisir à partager mon savoir, aussi infime soit-il. Vulgariser, cela signifie mettre à portée de tous. Je trouve cette idée à la fois sublime et déroutante, de pouvoir exprimer en peu de choses autant de savoir. » Eo se laissait bien souvent séduire par les mots, et elle ne pouvait qu’être d’accord avec ce que disait le Docteur. Elle n’avait rien à transmettre mais si elle avait un jour ce genre de savoir, ce serait certainement un honneur de pouvoir le transmettre. Lorsque la femme se présenta, Eo ne put s’empêcher d’avoir cette étincelle dans le regard – voilà que Mme Bloom travaillait sur les évolutions ! Un truc qu’Eo rêvait de comprendre, d’appréhender d’autant plus que « oh je pose une pierre sur toi mon chaton et tu te transformes ». Lorsque la docteure se pencha vers Lullaby d’en recevoir un peu d’attention de sa part, il la laissa faire mais garda son regard dardé sur Athéna. C’était cuit là, fallait plus le chercher il était parti dans un autre monde. « Oui, je trouve que c'est très poétique. »
« Votre spécimen d'évoli m'a l'air encore jeune. » Eo hocha la tête pour lui donner raison : il était vrai qu’elle n’y avait jamais vraiment réfléchi, mais Lullaby était encore un tout petit. Quand elle voyait que certains côtoyaient leur Pokémon depuis dix ans… Il lui restait encore énormément de choses à découvrir et à vivre à ses côtés. « Tous les pokémons ne réagissent pas de la même façon, mais tout comme chez les humains, il y a chez les jeunes cet enthousiasme, cette vie qui flamboie. Peut-être est-ce dû également à son caractère qui se forge, ou peut-être cherche t-il des références externes afin d'y calquer son attitude ? Prenons en référence Athéna. C'est une compagne douce, au caractère très câlin, mais également très dynamique. Elle ne cesse de courir partout, mais elle sait se montrer docile. » Lullaby ne put s’empêcher de relever les oreilles en entendant parler de la douce et belle Evoli. Câlin. Il adorait les câlins, ça tombait bien ! Mme Bloom s’adressa ensuite directement à lui. Lullaby hocha gravement la tête – bien sûr qu’il savait qu’il y avait des méchants partout, mais Eo ne marchait pas assez vite pour lui… et puis il y avait tellement de choses à voir et à découvrir, s’il n’allait pas les voir, il passerait à côté de toute une vie de curiosités ! « J'aimerai avoir une réponse claire à vos questions, mais hélas, je ne suis pas comportementaliste. » Mina se sentait un peu gênée de ne pas pouvoir l'aider plus que ça. « Mais peut-être puis-je glisser quelques mots à un ami qui pourrait vous aider à le discipliner en douceur. – Oh, ce serait déjà incroyable pour moi. Et si vous avez un peu de temps, j’aimerais en apprendre un peu plus sur votre métier. Les évolutions. C’est quelque chose d’extrêmement curieux, n’est-ce pas ? Surtout vu les spécimens que nous avons sous les yeux. »
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